Vers Deba sur le Camino del Norte – Mes Chemins de Compostelle

Dimanche 20 septembre,
32e étape : Saint-Jacques-de-Compostelle est à 817 kilomètres

Deba
De San Sébastian à Deba

8h15 nous laissons Zarautz, le ciel est très dégagé, il y a bien quelques nuages mais cela sent plutôt le beau temps, du moins j’essaie de m’en persuader.

Encore une fois il faut quitter le niveau de la mer et le chemin commence par un raidillon qui monte au milieu des vignes. Elles poussent sur une sorte de treillis horizontal à environ 1,5 m du sol, par endroits il y a même des bancs comme sous une treille.

Ce matin à l’Auberge de Jeunesse, surprise, en guise de petit-déjeuner nous avons eu droit à un petit sac contenant un yaourt, un petit jus de fruit, deux petites tablettes de chocolat, une grosse madeleine et une pomme, mais aucun raton laveur. C’est sûr que cela simplifie la vaisselle. Pour la boisson chaude nous avons dû solliciter la machine à café, un supplément imprévu.

Le paysage est magnifique, aujourd’hui nous allons à Deba à un peu plus de 20 km, le profil annoncé n’a pas l’air bien méchant.

La route serpente toujours entre les vignes qui sculptent les collines et contourne Guetaria avec de belles perspectives sur sa presqu’île, le « Raton ». Un peu plus loin nous rattrapons trois Françaises, Anne, Annick et Manuela qui débouchent du chemin arrivant de Guetaria où elles ont passé la nuit dans une « Pension ». Nous nous étions déjà croisés dans l’auberge d’Irun et à Pasajes lors de la traversée en barque. Comme toujours Christian a le contact facile et son côté Québécois déclenche curiosité et sympathie. Il fait très beau.

Vers 10h nous arrivons en vue de Zumaia, une ville assez importante avec un long estuaire qui relie son port à la mer. Nous arrivons à l’église juste avant la messe dominicale, les fidèles se pressent et se saluent sous le porche avant d’entrer. Je jette un coup d’œil à l’intérieur où les dernières informations paroissiales sont projetées sur un des murs, on n’arrête pas le progrès.

L’appel à la messe à Zumaia

A la sortie de la ville il faut à nouveau attaquer la montagne. La campagne est belle, une harmonie de verts avec de loin en loin la tache rouge et blanche d’une ferme ou les reflets argentés des ballots de foin. C’est dimanche et nous croisons des randonneurs venus profiter du beau temps. Rien de gênant, nous sommes pratiquement seuls, la montagne est à nous et à quelques moutons.

12h30 nous sommes à Itziar qui est précédée d’une montée sévère. Le ciel se couvre vers le sud, à tout hasard nous décidons de faire une pause casse-croûte rapide juste à la sortie de la ville sur un petit promontoire qui domine d’un côté l’église et de l’autre l’autoroute, qui en fait n’est jamais bien loin, mais aussi la mer.

La descente vers Deba est très pentue, cimentée, avec cette fameuse algue verte qui m’est encore une fois fatale : je glisse plusieurs fois pour finir vraiment par me rétamer sans bobo heureusement. Christian reste lui imperturbable. Il faut croire que la dernière portion était vraiment impraticable, ils ont installé des ascenseurs qui nous amènent en toute sécurité au centre ville, vers 13h30, où là encore nous tombons sur une fête, peut-être la sortie de la messe, nous nous mêlons à la foule et prenons un pot et un sandwich.

Ambiance dans un café sur la place de Deba

Nous savourons l’instant quand un homme vient à notre rencontre et nous demande en anglais si nous cherchons l’auberge des pèlerins. Ils nous indique qu’il faut aller chercher la clef à l’office de tourisme qui ferme à 14h le dimanche. Pas de temps à perdre, il nous y emmène. Je comprend alors qu’il est lui aussi un pèlerin, c’est un Allemand, Rodolphe.

L’auberge de Deba est minuscule, huit places, mais il paraît qu’il y a une annexe, et, c’est la première fois que je vois ça depuis mes classes dans la Marine, deux des trois lits superposés sont à trois niveaux. Les places du bas sont toutes prises ; ayant déjà bénéficié au frais de la nation de cet excellent entraînement à résister au mal de mer je renonce aux places du haut et m’installe, à regret, par pur altruisme, sur un lit au niveau deux. Ouf ! Les personnes déjà présentes nous annoncent qu’il n’y a pas d’eau chaude. Décidément c’est pire que pendant les classes. Par contre il y a une essoreuse. On ne peut pas tout avoir. C’est la première fois que je découvre ce merveilleux instrument dans une auberge : vous mettez votre linge dans une espèce de grande poubelle, contact, ça se met à tourner à l’intérieur avec un bruit plus ou moins fort, un petit filet d’eau sort par le bas, arrêtez le contact quand le filet d’eau est tari, vous pouvez sortir votre linge pratiquement sec. Par ces journées humides c’est inespéré. C’est la queue, tout le monde veut profiter de l’aubaine et sort son linge humide de plusieurs jours. Mais attention cela reste d’un maniement délicat. Quand vient mon tour je suis la procédure appliquée par les autres et… un bruit de bétonneuse retentit dans la minuscule chambrée. Rodolphe bondit de son lit, arrête tout, retire tout le linge, et remet un à un chaque vêtement en le laissant tomber délicatement dans le cylindre, comme pour vérifier qu’aucun ne contient un marteau ou une clef à molette, puis remet le contact, le tout sans un mot, puis retourne à son lit pendant qu’un doux ronronnement s’élève parmi nous. Ah ces Allemands, tous l’oreille musicale. Bon, d’accord, tout s’apprend, maintenant je sais, il m’arrivera même une fois d’initier fièrement un autre pèlerin au maniement complexe de ce monument de technicité. Le Chemin, un vraie découverte de la vie. Un peu plus tard un vieux monsieur vient voir si tout va bien, c’est l’hospitalero. Il s’excuse pour l’eau froide, il a constaté la panne ce matin mais c’est dimanche et le technicien n’est pas encore passé. Bon, tout est bien, je ne vais pas dormir dans la vigie, mon linge va être sec et j’ai pu vérifier ces jours-ci qu’on ne pouvait pas mourir sous un peu d’eau froide.

Les livres des récits de mes marches vers Compostelle

Dans la chambre il y a un couple d’Espagnols, Rodolphe qui a une tendinite et pour le moment marche avec ses sandales, il faut bien avancer, et nous y retrouvons Renée. Bientôt on affiche complet. En ville, vers 15 h nous retrouvons les Françaises qui arrivent. Nous leur signalons que l’Office de Tourisme étant fermé il faut maintenant s’adresser au Poste de Police pour obtenir les clefs, s’il reste de la place dans l’annexe.

Le soir repas sur la place où l’animation a repris après des alternances pluie-éclaircies. Nous nous installons à la terrasse d’un bistro mais nous avons été un peu trop optimistes, la pluie nous y surprend. Cette fois encore un menu sans grand intérêt. Aujourd’hui la journée était paisible, même si côté climat ou gastronomie nous ne sommes pas pour le moment très gâtés, il commence à se créer une petite communauté que nous avons plaisir à croiser ou à retrouver à l’étape.

Demain ce sera Markina à environ 22 km avec un dénivelé d’à peu près 500 m. Il est difficile d’allonger les étapes si on s’en tient aux « Albergues de peregrinos », il faudrait carrément doubler la distance et le profil ne s’y prête pas surtout les descentes dont je me méfie après mes expériences répétées d’aquaplaning. Et puis nous prenons le temps.

1003 kilomètres parcourus depuis Auffargis

 

2 réflexions au sujet de “Vers Deba sur le Camino del Norte – Mes Chemins de Compostelle”

  1. tout
    encore une fois, très bien raconté et une autre belle idée, ces ambiances de messe ( oui c’est vrai, le son des cloches est un peu félé! ) ou de café, à mettre en début de lecture…tout ceci fait ressurgir de ma mémoire de sacrés moments , super!! Amicalement..Michel

    Répondre

Laisser un commentaire