De Marsolan à Condom par La Romieu – Chemin de Compostelle

Lundi 15 septembre,
21e jour : Saint-Jacques-de-Compostelle est à 1069 kilomètres

Condom
De Marsolan à Condom par La Romieu
Pigeonnier
Paysage matinal

Un peu avant 8 h. Je quitte le gîte « l’Enclos du Tabus » à Marsolan, en direction du gîte d’étape « L’Etrier condomois » près de Condom. Il fait très beau et il ne fait pas froid, une belle journée qui s’annonce.

Chemin et maïs

Après une petite route secondaire goudronnée au départ de Marsolan, on suit des chemins herbeux. Dans les pentes quelquefois boueuses et glissantes  il faut mettre les carres.

Le chemin

En route des accueils pèlerins proposent café, fruits, œufs… avec un panneau indiquant « Servez-vous » accompagné parfois d’un tarif.

Accueil pèlerin

Je sens ma jambe plus qu’hier mais pas de façon douloureuse, plutôt une sorte de démangeaison : peut-être un signe de cicatrisation. Espérons.

Palombière

Avec un ciel pratiquement entièrement bleu  le paysage est nettement plus beau avec son alternance de champs : colza, labours, foins, tournesols rasés ou encore en fleurs… C’est paisible, vallonné, avec par-ci par-là des réserves d’eau pour l’irrigation et quelques tours, probablement des pigeonniers.

9h10 je suis à côté de la chapelle d’Abrin, ma jambe va bien, soyons intrépide, je décide de prendre la direction de La Romieu.

Le chemin est entre deux champs de maïs, on peut dire entre deux murs de maïs. Lors d’une étape précédente des pèlerins évoquaient avec des accents déprimés cette traversée du Gers qu’ils avaient déjà faite à une autre occasion. Moi je trouve ça paisible, mais c’est vrai qu’il fait beau et par temps de pluie c’est peut-être moins bucolique.

La Romieu, la collégiale Saint Pierre, le cloître
La Romieu, la collégiale Saint Pierre

Je voyage en fait dans une étrange géographie. Hier soir nos hôtes évoquaient les villes où ils vont faire leurs courses : Agen et Fleurance. Ces grandes villes ne sont pas loin mais je ne m’en rends absolument pas compte. Ce n’est pas la cinquième dimension mais presque. Dix kilomètres correspondent peu ou prou, en fonction du terrain, de la forme et des pauses, à une durée de deux heures et demie, ce qui donne une échelle tout à fait différente de l’espace. Au bout de plusieurs semaines on intègre ces données dans son rythme, dans sa façon de mesurer les distances, dans sa façon de penser.

La Romieu, le cloître
La Romieu, la collégiale Saint Pierre, le cloître

9h45 je suis dans une forêt, il y fait frais mais pas froid. Je fais une petite pause par principe pour mon pied qui va parfaitement bien par ailleurs. Je suis sous une palombière. Ca me fait penser que ce matin, pas un seul coup de fusil : ils doivent tous être au boulot, ou alors c’est un jour sans.

La Romieu, le cloître
La Romieu, la collégiale Saint Pierre

J’ai souvent admiré les gens qui, face à un gros obstacle dans leur vie, prenaient une décision de rupture avec la vie telle qu’ils l’avaient prévue au départ. Moi ce n’est pas du tout mon truc. J’essaye non pas de subir la réalité, ce n’est pas du fatalisme, mais de m’y adapter et en quelque sorte d’adapter la réalité à mes objectifs. Donc, d’abord je mesure l’ampleur du désastre puis, par petites touches, je mets en place une stratégie non pas pour contourner l’obstacle mais pour faire avec,  pour quand même aller vers où je veux aller. Dans le cas présent, à un moment j’ai pensé être contraint d’abandonner à cause de ma cheville mais en même temps cette idée m’était insupportable donc j’essaie d’aller au bout avec l’attelle et pour le moment ça à l’air de fonctionner. « Pourvu que ça doure ».

Les livres des récits de mes marches vers Compostelle
La Romieu, Angéline, la légende des chats

10h40 je suis dans La Romieu. Pour visiter la collégiale il faut obligatoirement payer. Bon, puisque je suis là je m’exécute. Je vois plein de sacs à dos donc je ne dois pas être le seul.

La cathédrale de Moissac est entièrement peinte à l’intérieur comme la plupart des églises de la région. A l’origine la collégiale Saint-Pierre à La Romieu l’était aussi, des fragments de peinture ont été retrouvés, mais au 19e siècle tout a été décapé pour faire apparaître la pierre : encore une idée géniale !

Le cloître est moins grand et moins bien conservé, ou moins bien restauré, que celui de Moissac mais l’ensemble est intéressant. Après concertation avec ma cheville qui est d’accord, je monte en haut des tours. Suite à cette ascension ma cheville restera nickel mais j’aurai quelques courbatures aux cuisses : les muscles de la marche ne sont pas ceux de l’escalade !

La Romieu, Angéline, la légende des chats

11h45 je quitte La Romieu. Le village est sympathique. Il est envahi par des chats fictifs en mémoire d’une légende locale « Angéline », jeune fille qui aurait sauvé des chats de la voracité de ses concitoyens lors d’une disette, chats qui en suite furent d’un grand secours pour se débarrasser des rats quand l’abondance revint. Le village est fortement touristique mais je ne regrette pas d’être passé par là. Il fait toujours beau.

Chapelle romane Sainte-Germaine
Castelnaux-sur-l`Auvignon

Au détour d’un virage, spectacle : trois dames derrière en l’air au milieu du chemin ! Je passe en les saluant, elles me répondent en riant. Le chemin est propre mais on trouve ça et là des papiers blancs dont on devine l’usage et je viens de comprendre pourquoi ils ne sont pas plus masqués.

12h45 Castelnaux-sur-l’Auvignon, de belles maisons, l’église et une vieille tour. Toujours le même calme à part un coq. Il y a un monument aux combattants espagnols de la 35e brigade qui sont venus se faire décaniller ici le 21 juin 44, jour de l’été. Apparemment il y a eu ici un combat important   :

 

13h10, chapelle romane Sainte-Germaine des 10e et 13e siècles. Très jolie. Très simple avec une charpente en bois. Autour, de la vigne, du raisin blanc.

Pause à l`ètang de Bousquetara

13h45 pause gastronomique devant l’étang de Bousquetara. Même menu qu’hier moins la tomate. Au bord de l’étang deux hérons qui chassent. J’en vois un qui avance à pas mesurés dans l’eau : lui aussi aimerait bien faire une pause casse-croûte.

Gîte de l`Etrier condomois

15h10 me voilà au gîte de l’Etrier condomois. Autour de moi plein de gamins ou d’ados qui s’entraînent sur des poneys ou des chevaux.

15h30 je pars visiter Condom à un kilomètre du gîte.

Condom, la cathédrale
Condom, la cathédrale

Le cloître a été transformé en espace culturel et promenade ; il en est un peu dénaturé mais reste intéressant.

Pèlerin

En ville je croise les Finlandais rencontrés à Golinhac. Je les salue mais apparemment ils ne me reconnaissent pas. Je croise aussi Jacques, rencontré lui à Saint-Privat-d’Allier. Il  voulait allonger les étapes. Aujourd’hui il a un problème au genou et va voir un kiné. Le chemin est plein d’imprévus.

De retour au gîte je suis toujours tout seul dans mon dortoir. Renseignements pris j’ai battu le record : je suis le seul hébergé dans ce gîte de 70 places. Hier il y avait 20 randonneurs, demain il y en a déjà plus d’une dizaine d’inscrits.

Le soir à la table nous sommes sept  : les patrons, leurs invités, deux garçons d’écurie et moi. A part les questions habituelles : d’où venez-vous, depuis quand êtes-vous parti, on n’échange pas grand chose. Mais enfin c’est quand même sympa, ils auraient pu me laisser tout seul dans un coin.

Aujourd’hui grand jour : j’ai franchi mon cinq centième kilomètre et demain j’attaque ma quatrième semaine. J’ai réservé au « Domaine du Possible », un nom plein de promesses, un peu avant Eauze où tout était plein. C’est  à 28 kilomètres : je me lance, ou plus tôt je me relance.

Condom, le cloître
504 kilomètres parcourus depuis le Puy-en-Velay

 

 

4 réflexions au sujet de “De Marsolan à Condom par La Romieu – Chemin de Compostelle”

  1. Re : Avec ou sans son chien ?
    Désolé de répondre si tardivement, je « pérégrinais ».
    Comme tu le dis, à toi de faire ta propre expèrience.
    En tous les cas Buen Camino à vous deux.
    Pierre

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  2. Avec ou sans son chien ?
    Bonjour Pierre. Félicitations pour ton site et tes récits de voyage qui se lisent comme un roman d’aventures. Voici déjà plusieurs mois que je me prépare pour « mon chemin ». Départ le jour de Pâques 2016 du Puy, destination Santiago.Je le ferai accompagné d’un de mes chiens, une femelle croisée Labrador – Galgo et que j’ai trouvée il y a 2 ans sur la route près de Granada (Espagne) abandonnée à 5 semaines et quasiment morte.! Nous marchons 20 à 25 kms 2 à 3 fois par semaine et il faut voir la joie qu’elle montre dès qu’elle se rend compte que nous partons et tout au long de la randonnée.Elle est très calme et super obéissante de même que parfaitement sociabilisée. Je ne puis envisager partir sans elle même si cela représente une contrainte. (Porter le matériel de camping – 2kgs, accepter d’être refusé dans beaucoup d’endroits,surtout en Espagne, marcher et définir les distances journalières à l’écoute de son compagnon à 4 pattes). J’ai beaucoup lu de récits de pèlerins qui sont pour et d’autres qui sont contre la présence du chien sur les chemins de Compostelle. Je crois, tout comme tu l’écris bien souvent dans tes comptes rendus à propos de la manière dont chacun aborde son chemin, qu’en cette matiere chacun aussi doit faire ses propres choix dont il est seul responsable. Tous ceux qui me liront et moi-même’ nous en saurons plus en avril – mai 2016. Ultreïa !

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  3. La Romieu
    Salut Bernard,
    C’est vrai que certains « pèlerins » croient que leur statut leur donne droit à tout mais c’est quand même une minorité.

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  4. Re: Condom
    Salut Pierre. Nous sommes passés à La Romieu quelques jours après toi … en voiture. Il y avait un pélerin, genre « moi je ne veux pas payer, ni pour dormir, ni pour manger, ni pour visiter… ». Et la Madame du guichet l’a laisser entrer gratis. Et en plus, il râlait car les visiteurs le gênaient dans sa visite… Il y a de tout dans les pélerins ?

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